jeudi 27 mai 2010

L'avortement

Je ne me suis jamais fait avorter.

Ma fille aînée s'est fait avorter dernièrement. En tout début de grossesse. J'en suis fort heureuse. L'angoisse aurait été intolérable de savoir ce bébé dans les mains d'une enfant de vingt ans adorable mais totalement imprévisible à cause de sa maladie mentale.

Ma deuxième fille est tombée enceinte à dix-sept ans d'un jeune homme qu'elle connaissait depuis trois mois. J'ai pensé qu'elle se ferait avorter et c'est ce qui m'apparaissait la meilleure solution. J'ai cependant gardé cette pensée pour moi et lui ai dit que je l'appuierais quelle que soit sa décision. Elle désirait réfléchir. Un dizaine de jours plus tard, elle me dit qu'elle est contre l'avortement et qu'il n'est pas question de tuer son bébé. J'ai été surprise. Et inquiète. Mais jamais je ne lui aurais conseillé l'avortement. Pas ouvertement du moins. La mère du papa du bébé m'appelait en secret pour me dire de l'influencer, ça n'avait pas de bon sens, ils étaient pauvres, trop jeunes et se connaissaient à peine. J'étais d'accord avec elle mais il n'était pas question que j'influence ma fille.

Le bébé a un an, le couple est toujours ensemble et ils s'en tirent plutôt bien. Mais ils ont besoin de beaucoup d'aide. Les deux familles leur en donnent. Le petit-fils est une merveille.

Je n'ose penser à ce qui aurait pu arriver si ma grande fille n'avait pas eu un accès facile et presque immédiat à un avortement gratuit et humain. L'avortement accessible est un progrès social. Il ne faut pas revenir là-dessus.

Mais c'est mon opinion et il faut accepter que d'autres personnes ne pensent pas comme moi. Leur droit de l'exprimer ne devrait pas être remis en cause. Il en va de la liberté d'expression.

Je trouve dérangeant que des foetus de plus de seize semaines soient avortés. Mais même si je frémis d'horreur à l'idée qu'un foetus viable soit extrait du ventre de sa mère, même là, je suis contre une législation étroite et encadrante. L'avortement, c'est du cas par cas et il est préférable que ça le reste. Forcer une femme à accoucher contre sa volonté, c'est du barbarisme. Il serait tout aussi monstrueux de l'obliger à avorter. Je suis pour la liberté de choix.

Évidemment, il faut de l'éducation sexuelle et un accès à la contraception. Mais même avec tout ça, une grossesse est toujours possible. Et la décision de garder cet enfant non-désiré appartient en premier à la femme qui porte ce foetus.

Quand "la femme" en question a quatorze ou quinze ans, la question se corse un peu beaucoup.

Je pense qu'il faut parler aux mères de la possibilité de donner la vie à leur enfant et de le confier à l'adoption. C'est une façon noble de donner une belle vie à un enfant qu'on n'a pas les ressources d'élever soi-même. Il y a tant de familles qui cherchent un enfant à aimer. La mère devrait avoir le droit de choisir la famille de concert avec les travailleuses sociales, elle pourrait les rencontrer, continuer à avoir des nouvelles de son enfant. Une option dont on parle peu, mais dans laquelle il y a bien des heureux. La mère aussi si elle sait qu'elle a fait le meilleur choix pour son enfant et qu'il a trouvé une famille stable et aimante.

Ce billet m'a été inspiré par celui d'Éléonore (dans mon blogroll) que je trouve bien documenté et articulé. Nos idées sont différentes mais nous croyons toutes les deux à la liberté d'expression.

21 commentaires:

coeurtendre2 a dit...

Moi aussi, je trouve dommage que l'adoption soit maintenant une option occultée et pourtant je crois que c'est une option qui pourrait etre explorée, exactement comme tu l'amènes femme libre.

Nanou La Terre a dit...

Billet intéressant Femme Libre. Je viens tout juste de terminer un long commentaire au billet d'Éléore. Je ne me répéterai pas ici, trop long. Alors, viens le lire si le coeur t'en dit.

Une femme libre a dit...

On m'a dit que les travailleuses sociales qui oeuvrent auprès des jeunes filles enceintes ne peuvent même pas parler de cette option à leurs clientes quand la grossesse n'est pas désirée, Coeurtendre2

Je vais vous lire là-bas, Nanou.

Mamzell_McJ a dit...

l'avortement je connais... j'aurais été incapable d'opter pour l'adoption.

Il faut que l'on puisse avoir le choix.

Méli a dit...

Je suis vraiment d'accord avec vous, moi aussi, je trouve que l'adoption peut être une solution qui a avantage à être envisagée (en tant que mère adoptive, c'est sûr que j'y suis sensible)et je suis aussi pour la liberté de choix... En fait, ce qui me dérange vraiment avec les pro-vie, c'est qu'ils ne le sont pas juste pour eux-mêmes, mais veulent obliger les autres à mener à terme une grossesse... C'est ça qui me bogue énormément... Qu'elles soient contre l'avortement pour elles même, aucun problème, mais qu'ils veulent imposer leur opinion aux autres, non, pour moi, c'est pas correct, il faut vivre dans la réalité... Je ne pense pas qu'il soit sain d'imposer un enfant non désiré à une femme... et puis, c'est bête et méchant, mais mausus, on va finir par avoir des problèmes de surpopulation, alors vive la contraception, vaut mieux avoir moins d'enfants et en prendre soin et les aimer...

baboulebou a dit...

Oui tout à fait d'accord avec toi (même si je ne suis un homme).

Je dis mes raisons dans le billet d'Eléonore, mais en 1 mot, même si l'on croit que l'avortement mène directement en enfer, c'est à Dieu de juger non, pas à nous, non?

Laissons donc le choix aux femmes de faire ce qu'elles veulent avec leurs corps, ET d'assumer leurs décisions!

Une femme libre a dit...

Voilà, le choix, je suis pro-choix et pro-vie également vu que je pense que tout enfant devrait être désiré, aimé et avoir une belle vie et ses parents aussi.

Imposer un enfant non-désiré à une femme, on n'en est plus là et il ne fait surtout pas y revenir,Méli. Mais suggérer l'adoption comme alternative à l'avortement, pourquoi pas? Suggérer, je dis bien, pas imposer d'aucune manière.

C'est très bien d'avoir l'avis d'un homme, Alexandre et le débat ne devrait pas se faire qu'entre femmes. En fait, le géniteur a une grande importance. Que fera-t-il si l'enfant n'est pas désiré, qu'il préconise l'avortement et que la femme refuse ce choix? Il est alors particulièrement mal pris. Soit il se sauve et c'est un écoeurant, soit il assume l'enfant avec tout ce qui vient avec. Pas si simple pour un homme qui a moindrement des principes moraux de se retrouver dans cette situation. La femme a le choix d'avorter ou pas, pas lui. Que feriez-vous si un amour d'un soir vous disait que le condom a coulé, qu'elle est enceinte de vous et qu'elle veut le garder?

Une femme libre a dit...

Je m'adressais à Juliette dans la première partie de l'autre commentaire.

Mayieve a dit...

je suis très d'accord. bon billet

Phil a dit...

Tu présentes là une opinion pleine de bon sens et de sensibilité. Et tout en nuances. Bravo !

Solange a dit...

Pour moi-même j'étais contre, mais je ne me permettrais pas de juger pour les autres. Par contre, je crois qu'il y a une limite dans le temps et que si on peut réchapper un prématuré, il est trop tard pour un avortement.

Une femme libre a dit...

Merci Mayieve.

Merci Phil.

C'est du cas par cas, Solange. Il est certain qu'un avortement tardif est dramatique mais

Mamzell_McJ a dit...

On ne me l'a seulement jamais offert, je veux dire mener à terme ma grossesse et donner le bébé en adoption.

Nanou La Terre a dit...

J'oubliais... Ton billet est rempli de bon sens et personnellement, je partage entièrement.Pro-vie, pro-choix.
Par contre, je suis aussi de l'avis que l'adoption devrait être optionnel et en aucun cas imposé. Je pense toujours au calvaire qu'ont subit nos mères, nos tantes,à cause des restrictions de l'Église.
J'ai eu une grande-mère bien d'avant-garde, la mère de maman: au début des années 60, ma tante est tombée enceinte. Ma grand-mère lui a dit: "T'es pas obligée de le marier et tu peux garder ton enfant si c'est ton désir, on va t'aider." Elle a gardé son enfant. C'est mon cousin. Je l'adore.

Une femme libre a dit...

@Juliette, c'est ce que je disais, je déplore que l'option garder l'enfant et le donner en adoption ne soit même pas proposée!

Mais bien sûr que l'adoption ne doit pas être imposée,Nanou! Proposée tout simplement, comme troisième option à garder son enfant ou à se faire avorter. Pas simple ce sujet...

Anonyme a dit...

Il me semble que donner la vie à un enfant puis lui trouver des parents adoptifs nécessite absolument un travail avec un psychiatre pour que la future mère prenne conscience de l'importance de cet acte, pour elle et pour l'enfant. De sorte qu'elle comprenne parfaitement et accepte complètement le fait que, si elle sera toujours sa mère naturelle, elle ne sera plus jamais sa "mère". Il me semble qu'il y a ensuite parfois beaucoup de remords et de regrets. Surtout si, ensuite, la mère ne peut plus avoir d'enfants...

Une femme libre a dit...

Il peut aussi y avoir des regrets si une femme qui a avorté ne peut plus avoir d'enfants, Tony. Je pense qu'une femme qui confie son enfant en adoption et qui le sait heureux peut être fière d'elle. C'est le comble de l'altruisme. Au Québec, il y a des retrouvailles possible quand l'enfant est adulte.

Mijo a dit...

Tiens, justement, je ne sais même pas si l'option de proposer son enfant à l'adoption est proposée chez nous aussi en France.
Je ne le pense pas.
Mais ouch quand la grossesse n'est pas désirée et s'il est encore possible d'avorter, je pense que le choix est vite fait.

La Mère Michèle a dit...

Dans tout ce débat, on ne pense jamais au bébé?

Je suis d'accord pour l'amas de cellule sans conscience, mais de là à avorter un bébé de 23 semaines par choix????

Alors qu'il souffre? Alors qu'il pourrait ... presque vivre??

Moi je dis que la femme qui porte cet enfant aurait pu y penser avant! Avant ce terme. Mettons dans les 12 premières semaines!

Actuellement la loi est à 20 semaines, et je trouve ça très cruel.

Désiré/pas désiré, on tombera pas mal tous d'accord qu'un enfant mis au monde sans amour est un enfant malheureux. Et qu'un avortement c'est mieux qu'un enfant malheureux. Mais moi je dis: au début de la grossesse seulement.

Il faut lire sur ce que ça fait au foetus. Et se l'appliquer mentalement à soi. Pour comprendre que ça a aucun sens, c'est inhumain.

Une femme libre a dit...

Je ne sais pas si on peut encore accoucher sous X en France, Mijo? Ici, il y a un phénomène de retrouvailles, il y a même des émissions de télé là-dessus, émouvantes sans aucun doute mais aussi larmoyantes et racoleuses. Je ne sais pas trop quoi en penser.

Je ne suis aucunement mais alors aucunement une spécialiste de l'avortement, La mère Michèle, mais j'imagine (je n'ai pas fait de recherches là) que ces cas d'avortements tardifs doivent être assez rares. Je ne sais pas si c'est toujours le cas mais il fallait attendre le deuxième trimestre de grossesse pour faire une amniocentèse pour détecter le mongolisme chez le foetus. Les parents se retrouvent alors avec le choix de mettre au monde un enfant souffrant de trisomie 21 ou bien d'avorter du foetus dont les mouvements utérins étaient parfois déjà perceptibles par la mère. Or, si on passe ce test de dépistage, c'est tout probablement qu'on ne veut pas accoucher d'un enfant handicapé, sinon pourquoi passer le test?

Et les cas (rares mais on est dans la rareté ici) où la mère ignore être enceinte et ne s'en rend compte qu'une fois la grossesse avancée?

Bref, je ne sais pas trop, je trouve tout ceci délicat et c'est bien certain que je ne voudrais pas moi non plus que le foetus souffre!

Mais je ne vois pas du tout comment on peut forcer un être humain à poursuivre une grossesse contre sa volonté.

Mijo a dit...

Suis-je bête, bien sûr, j'avais complètement oublié l'accouchement sous X permettant à une femme d'accoucher dans l'anonymat.

Tout ce que je sais c'est que très peu de femmes le font, sûrement celles pour qui un avortement serait trop dangeureux.

Depuis quelques années, même si ça reste un parcours de combattant, il devient plus facile à un enfant né sous X de rechercher sa mère biologique.