samedi 8 mars 2008

Parler ou se taire

Je n'ai rien dit. Pas encore. Quand je suis allée la reconduire à la maison, sa mère était encore au travail. Je suis rentrée chez moi, enfin seule avec Treize ans, contente de la retrouver sans intermédiaire. Elle était crevée après toutes ces nuits chez des amies ou avec des amies. La mode est aux nuits blanches. On est rentrées et on s'est fait un bon souper à son goût à elle, lire pas trop santé. J'avais envie de lui faire plaisir. Je sais, le mieux, c'est de ne pas céder, pour son bien à elle et pour mon bien à moi. Mais ce n'est pas ce que j'ai fait. Et pour accompagner ce souper dont les seuls légumes étaient la tomate de mon hamburger et le ketchup du hamburger de Treize ans, je me suis ouvert un Merlot. Que j'ai bu au complet. Ensuite, j'ai écrit le billet d'hier, qui vous a induits en erreur et fait croire que j'avais parlé aux parents et qu'ils m'avaient retournée de bord.

Je réfléchissais alors à ce droit immense des parents sur un être humain qui leur appartient selon la loi et à la profonde injustice d'appartenir à une famille nantie ou à une famille démunie. On ne naît tellement pas égaux. Et puis, j'ai écrit cette énormité qui s'apparente beaucoup à un jugement au sujet des habitudes de tabagisme extrêmes de cette famille. Il y a aussi cette autre habitude de faire venir la nourriture presque tous les jours. Je le sais parce que Treize ans les fréquente et qu'elle aimerait bien que je fasse la même chose. Chers les pizzas et les souvlakis livrés à la porte. Mais de quoi je me mêle?

J'ai fini par appeler Voisin. "Viens me chercher."

"Mais voyons, Femme libre, tu ne peux pas venir à pied? Ma voiture est prise dans un banc de neige depuis trois jours."

"Viens me chercher à pied toi, j'ai bu une bouteille de vin, je suis saôule, je ne veux pas me promener seule comme ça et puis tu en profiteras pour me faire tout ce que tu veux, je suis vraiment sans défenses."

Il est venu me chercher avec ses deux chiens. On a passé une super de belle soirée. Je souris encore quand j'y repense.

Merci pour vos commentaires. Je retiens particulièrement celui d'Édouard qui me déculpabiliserait de ne pas parler aux parents. J'aimerais bien vous voir sans broches mon cher Édouard. Le résultat de tant de travail doit être époustouflant. Vous étiez déjà très bien avant, alors là..

8 commentaires:

Solange a dit...

Au moins tout est bien qui fini bien.

Grande-Dame a dit...

C'est délicat. Beaucoup de gens peu nantis ont aussi un certain orgueil à se faire aider. Peut-être votre position de connaissance interposée par la filiation des deux amies vous avantagera-t-elle (on accepte parfois plus facilement l'aide d'étrangers que de la famille proche).

L'amie s'est-elle déjà plaint de sa condition dentaire?

Mes beaux-parents (depuis cinq ans) gens extrêmement généreux, connaissent mon grand orgueil lorsque vient le temps de nous aider. Je commence tout juste à accueillir avec grande joie leur support après avoir voulu démontrer maintes fois que j'étais indépendante et savais très bien m'organiser sans eux.

Ils ont eu le doigté et la délicatesse de toujours présenter leur aide sous forme de reconnaissance envers nous de les accomoder eux.

Par exemple, ma belle-mère, gaga de vêtements d'enfants pour ses petits-fils, s'est toujours défendue de ses nombreux (et souvent excessifs achats sous prétexte que c'était en spécial et qu'elle ne pouvait laisser passer des aubaines pareilles.

Lorsqu'ils partent en voyage et nous laissent leur voiture (une deuxième pour nous, qui nous accommode grandement), ils nous remercient toujours d'en prendre soin et de leur éviter de devoir payer un stationnement à l'aéroport (!).

Lorsqu'ils gardent les enfants, c'est toujours "leur" plaisir.

Leur façon de présenter les nombreux services qu'ils nous rendent ont fini par m'avoir à l'usure. Ils ont su détourner mon orgueil insidieusement avec une finesse et respect.

Anonyme a dit...

9 textes à lire depuis ma panne d'ordinateur. Je commence lundi, promis.

Mamzell_McJ a dit...

Ah voisin !

je vous envie. Il doit bien vous aimer pour prendre soin de vous :-)

Encre a dit...

Oui, un vrai chevalier servant, ce Voisin! ;)

Pour les enfants, c'est bien vrai et c'est une bien grande injustice que tous n'aient pas des chances égales de développement, de bonheur (un enfant harcelé par les autres n'est pas heureux) et égale jouissance de l'amour de leurs parents (je ne parle pas de ceux-ci que je ne connais pas).

Une femme libre a dit...

Solange, rien de fini vu que je n'ai pas encore trouvé la façon de parler à la mère!

Très délicat, c'est bien là mon problème,Grande Dame. Vos beaux-parents ont beau faire preuve d'une admirable délicatesse, ce sont les grands-parents des enfants et c'est en quelque sorte normal qu'ils les gâtent et qu'ils gâtent leur fils aussi, tandis que moi, je ne suis rien du tout, juste une femme qui se soucie d'une jeune fille qui est l'amie de sa fille. Mais je parlerai, je parlerai... Non, la jeune fille ne s'est jamais plaint de ses dents (pas à moi en tout cas et je ne veux pas en parler à ma fille) mais, elle en est sûrement bien consciente car elle a souvent une main sur la bouche et elle parle la bouche tellement fermée qu'on ne comprend rien. D'ailleurs, les dents ont quelque chose à voir avec une prononciation correcte. Des dents, ce n'est pas qu'esthétique, ça fait partie de la santé globale. Bon, me voilà repartie... ;o)

Bonne lecture, ma chère petite Fadette (j'adore votre nick!). Je suis productive, hein?

Juliette, Voisin fait preuve de beaucoup de tendresse à mon égard depuis qu'il est amoureux de sa patronne (appelons-la Dulcinée). Il m'est extrêmement reconnaissant de pouvoir m'en parler sans que je sois jalouse et est surpris de mon intérêt. S'il savait que je trouve cent fois plus intéressants ses états d'âme à propos de Dulcinée que le récit palpitant des finesses de ses chiens!

Encre, la cause des enfants m'a toujours tenu à coeur. Saviez-vous que je songe à nouveau à devenir famille d'accueil?

Anonyme a dit...

Le ketchup est très bon pour la santé, Femme Libre! C'est une source importante de lycopène. Voilà un argument de choix pour votre Treize ans.

Une femme libre a dit...

On achève le pot de ketchup et je n'ai pas l'intention d'en racheter, lycopène ou pas, petite Fadette. Elle fera comme Dix-sept ans, elle s'achètera ses cochonneries avec son argent de poche! Je pense que ces hamburgers étaient un adieu à une alimentation que j'abandonne vraiment, un dernier sursaut de la bouffe carnivore. Treize ans me suivra, pas le choix, même si elle chiâle, c'est maman qui fait l'épicerie.